Satyre ?

Pascal et Franck rentraient de l'école. A huit ans, ils étaient ensemble dans la classe de neuvième dont l'institutrice était mademoiselle Garnier. Depuis la maternelle, ils s'étaient toujours trouvés dans les mêmes classes et ils étaient inséparables. D'ailleurs, ils habitaient dans la même ruelle et jouaient tous les deux avant même d'avoir l'âge d'aller à l'école. Franck était le meilleur élève de la classe et Pascal aurait probablement été le plus mauvais s'il avait dû ne compter que sur lui-même. Heureusement, ses devoirs trouvaient une large source d'inspiration dans ceux de Franck et ses résultats étaient honorables. Cet arrangement leur convenait à tous deux puisqu'il leur permettait de ne pas être séparés.

Comme d'habitude, dès qu'ils avaient franchi la grille du collège, ils avaient couru une bonne centaine de mètres, grisés par la liberté retrouvée. Maintenant, essoufflés, ils se demandaient quelle bêtise ils allaient pouvoir inventer jusqu'à ce soir. Pour eux, ce n'étaient pas des bêtises bien sûr, mais dans le quartier ils avaient la réputation d'être les deux terribles. En principe, dans ce domaine, c'était Pascal qui menait le jeu. Il faisait preuve d'un génie inventif dans cette spécialité et Franck se chargeait lui de trouver des solutions pour qu'ils ne soient pas pris. Les deux camarades étaient donc très complémentaires.

- Tu sais pas, annonça Pascal, samedi après-midi, j'ai vu le zizi de Florence.

La petite Florence, qui avait cinq ans, habitait au bout de leur ruelle, juste en bordure du terrain vague qui précédait les champs des maraîchers, miraculeusement épargnés au beau milieu de cette banlieue triste.

- Ah bon, fit Franck admiratif. Et comment c'est ?

Sur ce sujet, Pascal lui avait déjà appris pas mal de choses. C'est lui qui lui avait montré une fois comment embrasser une fille, renseignement qu'il tenait lui-même de son frère aîné.

Depuis cette époque, ils avaient chacun une petite copine : Fabienne pour Pascal et Sylvie pour Franck. Ils étaient les seuls à avoir une petite copine dans leur classe, ou plutôt les seuls à l'embrasser sur la bouche.

- C'est comme une espèce d'abricot, expliqua Pascal, mais coupé au milieu et ça devient tout rose quand on le frotte.

- Mais comment elle fait pour faire pipi avec ça, s'interrogea Franck inquiet.

- Il y a un petit trou au milieu et ça doit être par là, affirma Pascal.

- Ca ne doit pas être pratique, réfléchit Franck. Mais comment est-ce que tu as fait pour le voir, demanda-t-il.

- Ben je lui ai montré le mien et je lui ai donné deux chewing-gums.

- Dis donc, suggéra Franck, j'aimerais bien le voir aussi. Tu crois qu'elle sera d'accord ?

- T'inquiète pas pour ça. Elle fera ce que je voudrai.

Les deux camarades passèrent chez eux en courant pour poser leurs cartables. Ils achetèrent quelques sucreries à la boulangerie. Ensuite, ils se dirigèrent vers le pavillon du bout de la rue où habitait Florence. Celui-ci se trouvait à l'extrémité de la rangée de jardins, au bord du terrain vague dont il n'était pas séparé. Florence jouait dans le jardin avec une balle magique qui rebondissait extraordinairement. Pascal l'appela discrètement :

- Florence, viens voir.

La petite approcha, heureuse d'être tirée de sa solitude car elle n'allait pas encore à l'école. Sa mère ne s'y étant pas pris à temps pour les inscriptions, elle n'avait pas eu de place. Et puis elle était fière d'intéresser des grands de huit ans.

- Tu viens te promener avec nous dans les champs, demanda Pascal.

- Mais ma mère m'a interdit de sortir.

- Elle est là ?

- Non.

- Alors elle n'en saura rien. Allez viens, et puis on a des bonbons, l'allécha Pascal.

Les yeux de la petite brillèrent.

- Non, je ne peux pas, protesta-t-elle pour la forme.

- Tant pis, on y va sans toi, conclut Pascal.

Les deux compères entrèrent dans le terrain vague. La petite hésita puis les suivit en courant. Elle les dépassa et alla se dissimuler derrière un rideau d'arbres en vérifiant que la voisine d'en face ne l'avait pas aperçue. Mais tout semblait calme. Les garçons la rejoignirent et ils partirent tous les trois. Ils traversèrent les broussailles du terrain vague et débouchèrent dans les champs. Ceux-ci étaient désert, les maraîchers ayant fini leur journée. Pascal distribuait parcimonieusement les bonbons à la petite Florence.

Au beau milieu des champs, il y avait une sorte de petite cabane en bois où les maraîchers abritaient leurs outils. Celle-ci n'était pas fermée à clef et les garçons en profitaient souvent pour y entrer le soir. Ils pouvaient ainsi fumer de vieux mégots sans risquer d'être découverts. Ils entraînèrent la fillette jusqu'à la cabane et tous trois entrèrent. Ils s'assirent en cercle sur le sol. Pascal se rapprocha de Florence et lui passa son bras autour des épaules. La petite ne fit rien pour l'en empêcher, au contraire, et son coeur battait très fort. Pascal voulut remonter sa courte robe au dessus de sa taille, mais la petite le retint.

- Qu'est-ce que tu veux, demanda-t-elle.

- Montre-nous ton zizi, ordonna Pascal.

- Non, je ne veux pas !

- Mais pourquoi tu ne veux pas ? L'autre jour tu me l'as laissé voir.

- Oui, mais je ne veux pas que Franck le voie.

- Mais pourquoi ? C'est lui qui a acheté les bonbons, tu sais, mentit Pascal. Si tu nous montres ton zizi, on te donne une sucette.

Et Pascal d'extirper une énorme sucette bariolée de sa poche. Florence fit la moue puis elle saisit la sucette. Lorsque Pascal lui remonta sa robe, elle se débattit un peu pour la forme, mais cessa vite et sa petite culotte apparut. Pascal tira sur l'ultime rempart d'étoffe et le déposa à côté de lui tandis que Franck se rapprochait à quatre pattes. La gamine ne se souciait plus de rien et avait commencé à lécher sa sucette. Les deux garçons avaient maintenant le nez collé au curieux bourrelet fendu qu'ils n'avaient pas et incrédules, ils essayaient de l'ouvrir avec leurs doigts, mais la petite se plaignit :

- Aïe, ça fait mal.

- Sois gentille, dit Pascal, et tu auras une autre sucette tout à l'heure.

La petite ne dit plus rien et Pascal renouvela sa tentative. Sans douceur, il introduisit son doigt dans le vagin de la petite qui poussa un hurlement à la suite de cette défloration partielle. Pascal la força à se taire en lui plaquant sa main sur la bouche. Mais la petite continuait de brailler et en se débattant réussissait à placer quelques mots. Elle criait qu'ils étaient très méchants et qu'elle allait tout dire à sa mère. Les garçons commencèrent à avoir très peur quand ils virent le sang qui coulait à flots et qui ne semblait pas vouloir se tarir.

- Oh là là, gémit Pascal, qu'est-ce qu'on va faire ? On va se faire tuer !

Franck proposa :

- Si tu ne dis rien à ta mère, on te donnera plein de sucettes. Et du zan. Et des chewing-gums.

- Je m'en fiche, je dirai tout, glissa-t-elle entre ses sanglots.

Les deux garçons s'affolèrent. Franck déclara froidement :

- Elle ne dira rien, on n'a qu'à la tuer.

- T'es fou, protesta Pascal.

- On n'a pas le choix.

Franck saisit un plantoir posé contre le mur.

- Tiens-la, ordonna-t-il, je vais le faire.

Pascal bloqua la petite tant bien que mal et Franck frappa au ventre. Du sang gicla mais la fillette bougeait encore. Il frappa de nouveau, mais elle continuait de remuer.

- Ah la vache ! Aide-moi, bon sang !

Pascal lâcha la petite et saisit à son tour une binette. Il cogna en fermant les yeux. Florence continuait de geindre. Les deux garçons n'en pouvaient plus, horrifiés par ce qu'ils faisaient et ils continuèrent à taper, taper, taper, taper. Lorsqu'ils jetèrent les outils, Florence n'était plus qu'une chair sanguinolente.

Ils s'essuyèrent les mains dans la terre aussi soigneusement qu'ils le purent, et nettoyèrent les manches des outils en pensant aux feuilletons policiers. Ils rentrèrent chez eux en faisant un immense détour pour qu'on ne les voie pas arriver des champs. Ils se cachèrent si bien que personne ne les remarqua.

Le lendemain, les maraîchers trouvèrent le corps. Ils furent d'abord soupçonnés mais se disculpèrent aisément. Malheureusement, les outils furent manipulés avant l'arrivée de la police et les empreintes furent inutilisables. D'ailleurs, elles n'auraient pas été lisibles. Les enquêteurs imputèrent le crime à un satyre, probablement impuissant puisqu'il n'y avait pas de traces de sperme, ou peut-être à une femme compte tenu de la faible profondeur des blessures.

(c) François Hède 1986 - reproduction interdite par tous moyens.

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